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La création est un processus symétrique entre l’invisible et le visible.

« L’iconographe, tel que la tradition l’envisage, est avant tout un « acteur anonyme », dans le sens où rien de sa singularité idiosyncratique en peut transparaître dans l’œuvre qu’il réalise. Il est un instrument fidèle, parfaitement adapté à la mise en forme de l’image invisible du Divin, l’iconostase. Son talent d’artiste – son kushala comme dirait la Gîtâ – est essentiellement au service de sa dévotion au Divin et non au service de l’expression de sa singularité créatrice, comme c’est presque toujours le cas dans l’art moderne.

Ce n’est pas son moi qui cherche à se manifester esthétiquement. Au contraire, c’est sa transparence psychique qui permettra à l’iconostase de se traduire fidèlement dans l’icône. L’iconographe n’est autre que le parfait intermédiaire, le passeur discipliné, entre l’iconostase et l’icône. Ce n’est pas lui qui invente l’iconostase, c’est elle qui le traverse. Ce n’est pas lui qui fait l’icône, c’est elle qui se fait à travers lui. Tout ce qui est attendu de lui, c’est l’absolue présence aux différentes étapes du passage de l’image invisible à l’image visible.

Il doit pouvoir s’élever dans l’intemporel, où l’image divine est à jamais inscrite dans l’Invisible. Celui qui contemple l’œuvre est vraiment transporté dans les hautes sphères de l’expérience esthétique à partir du moment où il perçoit que l’artiste qui lui fait vivre cette expérience est intérieurement habité par quelque chose de mystérieux qui le transcende.
Ce qu’il goûte est au-delà du simple talent, de la simple virtuosité de l’artiste ; ce qu’il goûte est de l’ordre du mystère de la présence partagée d’une transcendance. Tout se passe dans le secret de l’instant présent.

L’artiste est avant tout le canal par où coule le secret. Le secret de la source.
Chacun de nous est un canal et c’est ce canal qu’il s’agit de garder vierge et fidèle.

C’est par la contamination de l’ego que le canal se prend à vouloir être auteur. »

Jean Letschert, La voie de l’Essentiel, Les Upanishads d’hier à aujourd’hui

Je me sens comme une peintre d’icône quand je peins les yantras. Ils sont des portes vers le cœur profond, vers le silence, vers l’Esprit unifié, vers la simplification de l’esprit, vers l’humilité, vers la joie profonde, la sérénité, la plénitude, la pure présence qui n’a pas besoin de s’objectiver, vers la lumière, vers le mystère de la création, de l’univers.

Laisser le regard plonger dans ces portes ouvertes, là où se cache l’Essentiel, recouvert par le voile des formes et des couleurs, le non-manifesté joue à cache-cache. Il s’agit d’ouvrir les yeux sensibles, ceux du cœur profond et de laisser l’intelligence rationnelle au repos.
Les yantras s’adressent à l’intelligence sensible, intuitive. Ils ne s’expliquent pas, ils touchent l’être, le cœur si on se laisse toucher sans le filtre de la raison.

L’invisible se dissimule dans le cœur de la matière sous la forme d’une vibration subtile.

Il m’est impossible de faire une couleur opaque, mes couleurs agissent comme des voiles, la transparence est toujours présente, pour laisser la sensation de la pure lumière transparaître.

Symbolique du yantra

Le Yantra est un support graphique de méditation, issu de la tradition hindoue.
Il symbolise une vérité, une qualité du monde : L'amour universel, la vérité suprême...

C’est une composition géométrique proportionnée dessinée pour dompter le mental et le réunifier. Il peut permettre à celui qui le contemple d’accéder en direct à l’énergie du principe ou de la vérité évoquée dans le yantra.

Les formes qui le composent, triangles, carrés, cercles véhiculent des contenus conscients de par leur signification connue, mais ils interpellent aussi des structures psychiques inconscientes.

Dans la symbolique mystique traditionnelle indienne, le sens de ces figures géométriques est le suivant :

  • Le point, bindu, énergie, centre où a lieu la création
  • Le triangle équilatéral pointe vers le bas, Shakti Kona, aspect féminin, l'eau ;
  • Le triangle équilatéral pointe vers le haut, Shiva Kona, aspect masculin, le feu ;
  • Le cercle, Chakra, l'air ;
  • Le carré, Bhupura (ou Bhur en sanskrit), la terre ;
  • La fleur de lotus, Padma, la pureté.

Un yantra est toujours circonscrit dans une structure globalement carrée.

 

 
« Si je crée à partir du cœur presque tout fonctionne, si je crée à partir du mental presque rien. » Marc Chagall